AGRICULTURE DURABLE ET INNOVATION SCIENTIFIQUE : Le Rwanda mise sur la biotechnologie agricole pour protéger l’environnement et renforcer la résilience des cultures

Face aux effets du changement climatique, à la pression des maladies végétales et à la dégradation des écosystèmes agricoles, le Rwanda intensifie ses investissements dans la biotechnologie. À travers le projet BioCap, le pays ambitionne de développer des cultures plus résistantes, tout en réduisant l’usage de pesticides et l’empreinte environnementale de son agriculture.

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Alors que l’adoption des organismes génétiquement modifiés (OGM) demeure encore marginale en Afrique, le Rwanda s’impose progressivement comme l’un des pays pionniers du continent dans ce domaine. Le lundi 15 décembre, le ministère rwandais de l’Agriculture a officiellement lancé le projet Rwanda Biotech Capacity Building (BioCap), une initiative stratégique visant à renforcer les capacités scientifiques nationales en biotechnologie agricole sur une période de cinq ans.

Mis en œuvre par l’Office national de développement de l’agriculture et des ressources animales (RAB) en collaboration avec le Centre international de la pomme de terre (CIP), le projet a pour objectif de développer des variétés améliorées de cultures clés, tout en intégrant des considérations environnementales majeures. Dans un premier temps, BioCap se concentrera sur trois cultures stratégiques : le manioc, la pomme de terre et la banane, essentielles à la sécurité alimentaire du pays.

L’un des axes structurants du projet est la construction d’un centre d’excellence en biotechnologie des cultures sur un site du RAB à Rubona. Cette infrastructure, soutenue par un financement de 14 millions de dollars de la Fondation Bill & Melinda Gates, vise à devenir un pôle de recherche et de formation de référence. Les scientifiques rwandais y seront formés aux techniques avancées de transformation génétique, d’édition du génome, de diagnostics moléculaires et de biosécurité.

Sur le plan environnemental, ces avancées pourraient avoir un impact significatif. Selon les autorités agricoles, les nouvelles variétés développées permettront notamment de lutter contre le mildiou de la pomme de terre, une maladie fongique responsable de pertes pouvant atteindre 100 % des récoltes en Afrique de l’Est. En renforçant la résistance naturelle des plantes, le recours aux pesticides chimiques pourrait être fortement réduit, limitant ainsi la pollution des sols et des ressources en eau.

Le projet prévoit également l’amélioration génétique du manioc pour le rendre résistant au virus de la striure brune, capable de détruire jusqu’à 80 % des récoltes, ainsi que le développement de variétés de bananes plus résistantes au flétrissement bactérien et à la fusariose. Ces innovations contribueraient à stabiliser les rendements agricoles tout en favorisant des pratiques plus respectueuses de l’environnement.

« Le projet BioCap renforcera la capacité du Rwanda à produire des données réglementaires, environnementales et de sécurité alimentaire, et à intégrer les cultures biotechnologiques dans les essais de performance, les systèmes semenciers et les services de vulgarisation », a souligné la ministre de l’Agriculture et des Ressources animales, Solange Uwituze.

Cette initiative s’inscrit dans une stratégie nationale plus large visant à faire de la biotechnologie un levier d’adaptation de l’agriculture rwandaise face au changement climatique. Lancé en octobre 2024, le Programme national de biotechnologie, doté d’un budget de 9,9 millions de dollars sur cinq ans, ambitionne d’améliorer la productivité de cultures majeures telles que le manioc, le maïs et la pomme de terre, grâce à des variétés plus résistantes à la sécheresse, aux maladies et aux parasites.

Depuis juillet 2023, le Rwanda dispose d’un cadre juridique autorisant l’utilisation et la commercialisation des OGM, même si aucune culture génétiquement modifiée n’est encore exploitée à grande échelle. Toutefois, des essais sont déjà en cours : en septembre 2024, le RAB a lancé des tests sur des variétés de pommes de terre OGM résistantes au mildiou.

En renforçant son expertise en biotechnologie agricole, le Rwanda entend ainsi concilier sécurité alimentaire, protection de l’environnement et agriculture durable, dans un contexte régional marqué par de fortes vulnérabilités climatiques et écologiques.


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