COP30 : L’Afrique face à l’hypocrisie climatique du Nord

Alors que la COP30 s’ouvre à Belém, au Brésil, le scénario semble déjà écrit. Derrière les discours de solidarité et les promesses de financement, le déséquilibre persiste : le Nord continue de polluer, et l’Afrique de payer. Malgré ses appels à une véritable justice climatique, le continent reste exclu des décisions majeures, piégé dans un système où les prêts remplacent les réparations et où les promesses se diluent dans la diplomatie.

COP30 Légende : COP30

Depuis des années, les conférences climatiques se succèdent sans résultats concrets pour l’Afrique. La COP29 de Bakou, présentée comme celle de la finance climatique, en fut la preuve. Les pays développés ont promis 300 milliards de dollars d’ici 2035, bien loin des 1 300 milliards annuels réclamés par les négociateurs africains pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Corrigée de l’inflation, cette somme représenterait à peine 175 milliards de dollars réels.

Pire, la plupart de ces financements prendront la forme de prêts, et non d’aides ou de réparations. Le continent, déjà lourdement endetté, consacre près de 163 milliards de dollars par an au service de sa dette — souvent envers les mêmes créanciers qui se disent aujourd’hui solidaires du climat. Sous couvert d’aide, le Nord enferme à nouveau l’Afrique dans une spirale d’endettement.

L’Afrique, victime d’un système verrouillé

Le principe de responsabilités communes mais différenciées, inscrit dès 1992 dans la Convention climat, a été vidé de sa substance. Pendant que les grandes puissances continuent de subventionner leurs hydrocarbures, elles exigent du Sud des efforts qu’elles-mêmes ne consentent pas.

À Bakou, plus de 2 000 lobbyistes des énergies fossiles étaient accrédités, illustrant la mainmise des intérêts industriels sur les négociations. Résultat : l’Afrique devient le terrain d’expérimentation des marchés carbone, où les pays riches achètent leur tranquillité écologique en “compensant” leurs émissions… au détriment des communautés locales.

Les voix africaines, elles, peinent à se faire entendre. Les décisions se prennent à huis clos, loin des réalités du terrain. Comme le rappelait Ali Mohamed, négociateur du groupe africain, l’accord issu de la COP29 était « trop faible, trop tardif et trop ambigu ».

Reprendre le contrôle : un levier stratégique

Faute de financements équitables, plusieurs pays africains — du Sénégal à l’Ouganda — se tournent vers leurs ressources fossiles pour financer leur développement, au grand dam des puissances occidentales.

Pourtant, le continent détient un atout majeur : les minerais critiques (cobalt, lithium, graphite) indispensables à la transition énergétique mondiale. L’Afrique doit en faire un outil de négociation. Pas de financement juste, pas de minerais. Ce n’est pas du chantage : c’est de la justice.

L’avenir du climat passe par une alliance Sud-Sud entre l’Afrique, l’Amazonie et les autres régions du Sud global. Ensemble, elles pourraient imposer une nouvelle logique fondée sur la souveraineté, la réciprocité et la responsabilité partagée.

L’heure de vérité pour le système climatique

La COP30 pourrait être celle du sursaut ou celle du renoncement. Si les pays du Nord persistent à transformer la solidarité climatique en marché financier, le fossé entre promesse et action continuera de se creuser. Et lorsque les projecteurs s’éteindront à Belém, l’Afrique, encore une fois, restera seule face à l’urgence climatique.


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