Du 27 au 28 octobre 2025, le Bénin est devenu l'épicentre du dialogue climatique continental en accueillant au Palais des Congrès de Cotonou la sixième édition du Sommet Climate Chance Afrique. Sous le thème « Énergies renouvelables, adaptation et biodiversité : enjeux et perspectives », cet événement a rassemblé la communauté non-étatique la plus représentative du continent : gouvernements locaux, entreprises, institutions financières, société civile et chercheurs. Le Sommet de Cotonou, succédant à Agadir, Abidjan, Accra, Dakar et Yaoundé, a marqué une étape cruciale pour transformer les vulnérabilités africaines en solutions concrètes, à quelques semaines de la COP30 de Belém au Brésil.
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L'accueil de ce sommet par le Bénin n'est pas anodin, le pays incarnant parfaitement cette « Afrique des solutions ». Placé sous l'égide des Ministres José Didier Tonato (Ministre du Cadre de vie et des Transports, chargé du Développement durable) et Raphaël Akotegnon (Ministre de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale du Bénin), ainsi que du Maire de Cotonou, Luc Atrokpo, l'événement a mis en lumière l'engagement national.
En effet, le Ministre de la Décentralisation, M. Raphaël Akotegnon, a rappelé la politique climatique proactive du Bénin, structurée autour de trois piliers essentiels depuis 2016. Le pays multiplie les initiatives pour l'accès universel à l'électricité propre d'ici 2030, notamment via l'augmentation rapide de la part du solaire. En matière d'adaptation, le Plan National d'Adaptation (PNA) de 2022 guide des actions stratégiques contre l'érosion côtière et les inondations, tandis que la création d'aires marines protégées et la gestion de la réserve de biosphère de l'Ouémé illustrent l'engagement pour la biodiversité. Le Ministre a souligné que le changement climatique est désormais une ligne directrice intégrée à toutes les politiques publiques nationales.
Le Maire de Cotonou, M. Luc Atrokpo, a insisté sur le rôle central des villes dans cette dynamique, affirmant que la capitale économique a l'ambition de devenir un exemple de transition énergétique et de protection de la biodiversité. Il a appelé à repenser les modèles de développement et à mobiliser l'action collective, notamment à travers le lancement imminent de l’Alliance des villes côtières d’Afrique de l’Ouest, initiative locale visant à défendre l’avenir des populations face à la montée des eaux et à l'érosion.
Coopération Euro-Africaine : Un destin climatique lié
Les travaux du Sommet ont résonné d'un message clair : l'Afrique et l'Europe ont un intérêt commun évident à renforcer leur coopération et à peser ensemble sur la scène internationale. Ronan Dantec, Sénateur et Président de Climate Chance, a insisté sur cette conviction, portée depuis la création de l'association, réaffirmant l'urgence de cette synergie pour le bénéfice des deux continents, vulnérables malgré leur faible contribution aux émissions mondiales. Il a rappelé que l'urgence est telle qu'elle exige de nouvelles réponses, notamment en matière de financement.
L'Europe a répondu présente par la voix de Stéphane Mund, Ambassadeur de l'Union Européenne au Bénin. Ce dernier a mis en avant la contribution majeure de l'UE au financement climatique mondial, avec une part significative dédiée à l'adaptation. Il a détaillé deux initiatives phares du dispositif « Équipe Europe » : le programme « Climate Change Adaptation and Resilience in Africa », qui a mobilisé plus d'un milliard d'euros pour renforcer la résilience, et l'« Africa EU Green Energy Initiative », destinée à investir plus de 20 milliards d'euros pour développer 50 gigawatts supplémentaires et donner accès à l'énergie à 100 millions d'Africains d'ici 2030. L'Ambassadeur a souligné que la réussite de la transition écologique passera par « la coopération, la solidarité et l'innovation ».
Vers un nouveau paradigme économique et financier
Un débat central a porté sur la nécessité de débloquer des financements adaptés aux réalités africaines. Le Sénateur Dantec a souligné un changement de paradigme fondamental dans le secteur des énergies renouvelables : grâce aux avancées technologiques, les modèles économiques sont désormais viables, les PME africaines préférant des emprunts à taux accessibles aux subventions pour un retour sur investissement assuré. La Feuille de route de Cotonou sur les énergies renouvelables a été construite pour formaliser ce basculement et encourager l'auto-organisation énergétique locale.
Les institutions de développement se sont alignées sur cette dynamique. Laure Weisgerber, Directrice de l’Agence Française de Développement (AFD) au Bénin, a illustré l'accompagnement de la France, qui se traduit par le financement de centrales solaires totalisant 100 MW au Bénin, ainsi que par le soutien à l'adaptation urbaine et à la préservation des écosystèmes. De son côté, Yohann Zaba, Représentant de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD), a détaillé l'engagement de son institution via le plan stratégique Djoli-Ba pour « verdir » son portefeuille. Fort de ses accréditations auprès des fonds climat, la BOAD a mobilisé plus de 200 milliards de Francs CFA et déploie de nouveaux programmes d'investissement ainsi qu'une assurance paramétrique contre les risques de catastrophe.
La voix du terrain : l'économie circulaire et les défis de financement
Le Sommet a également donné la parole aux acteurs de l'économie sociale et solidaire, dont l'action concrète est vitale. Myriam Aloègninou Bouillaud, Directrice exécutive de l'association Gbobètô à Porto-Novo, a illustré le potentiel de l'économie circulaire en transformant les déchets en leviers de développement, notamment par la valorisation du plastique et la production d'éco-charbons.
Elle a toutefois rappelé que pour les petites structures, le principal défi demeure le financement, insistant sur le besoin de renforcer le dialogue entre les acteurs de terrain et les grandes institutions financières pour que les besoins réels en investissement soient effectivement pris en compte.
Le Sommet Climate Chance Afrique 2025 à Cotonou s'est donc achevé avec le sentiment d'avoir non seulement identifié les défis, mais surtout d'avoir jeté les bases d'initiatives structurantes. L'Alliance des villes côtières, la Feuille de route sur les énergies renouvelables et le renforcement des financements concessionnels constituent des avancées concrètes pour que l'Afrique affirme son rôle d'acteur incontournable dans la construction d'un futur soutenable, résilient et vert.