Tripler les énergies renouvelables d'ici 2030, c’est l’engagement pris par 118 pays à la COP28. C’est du moins ce qu’on retient des propos du président de la COP Sultan Al-Jaber le samedi 2 décembre 2023 à Dubaï. Les plus grands pays producteurs ou consommateurs d’énergies fossiles tels que la Russie, l’Arabie saoudite, la Chine, l’Iran, l’Irak, le Venezuela, le Koweït, l’inde, le Qatar… ont manqué à l’appel. « J’ai besoin de plus, je demande respectueusement à toutes les parties (à la COP) de nous rejoindre dès que possible », a déclaré Sultan Al Jaber à la tribune de l’événement. Il poursuit en ces termes : « Cela peut aider et aidera le monde à sortir du charbon » sans captage de carbone.
Les 118 pays se sont engagés à « travailler ensemble » en vue de porter les capacités mondiales d’énergies renouvelables à 11.000 gigawatts (GW) à l’horizon 2030, contre environ 3.400 GW aujourd’hui, en prenant en compte « les différents points de départ et circonstances nationales » des différentes nations. Fin 2022, les capacités mondiales étaient de 3.372 GW, selon l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena), dominées par l’hydraulique (37 %) et le solaire (31 %). Les pays ont également promis de doubler le rythme annuel de progression de l’efficacité énergétique jusqu’en 2030, de 2 % à 4 %. Ces engagements n’ont toutefois pas de valeur contraignante.
Joyce Lee, haut responsable au Global Wind Energy Council, salue « le levier d’action le plus efficace de la décennie […] Ce qu’il faut maintenant, c’est que les pays transforment cet objectif en politiques, en règlementations et en investissements ». Avertissement du côté des Petits États insulaires dont la survie est menacée : « Cet engagement ne peut blanchir les pays qui, en même temps, étendent leur production d’énergies fossiles », lance Tina Stege, envoyée spéciale des îles Marshall. Selon les informations rapportées par RFI, les Émirats, entre autres, sont dans le viseur : ils projettent l'un des plus vastes plans de développement d'hydrocarbures du monde.
L'Union européenne avait lancé un appel en ce sens au printemps, soutenu par la présidence émiratie de la COP28 puis successivement par les pays du G7 et du G20 (80 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre). « Avec cet objectif mondial, on envoie un message très fort en direction des investisseurs et des marchés financiers. On montre le sens de la marche. Et c’est pour eux une façon de ‘dérisquer’ leurs investissements parce qu’ils savent que le monde entier se dirige vers cet objectif », a indiqué la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen à Dubaï. « Il y a des arguments très convaincants en faveur des renouvelables, parce qu’une fois installées, elles peuvent produire une énergie propre et locale. Donc cela vous rend indépendant et elles sont moins chères que les énergies fossiles », a-t-elle argumenté.
Au cours de cette conférence, 50 groupes pétroliers ont lancé une « Charte de la décarbonation du pétrole et du gaz ». Une initiative qui ne trompe pas grand-monde. Représentant 40% de la production mondiale, ces entreprises, dont 29 nationales, se sont engagées à décarboner leurs opérations de production d'ici à 2050, a annoncé samedi la présidence émiratie de la COP28. Cette « Charte de décarbonation » concerne seulement les émissions de gaz à effet de serre produites par les opérations d'extraction et de production. Elle n'englobe donc pas le pétrole qu'elles vendent. Donc le CO2 émis lors de l'utilisation du pétrole et du gaz – par le transport routier, la construction, pour le chauffage, la fabrication de plastique etc... – n’est pas comptabilisé. Or, ce secteur représente entre 80 à 95% des émissions, selon l’Agence internationale de l’énergie. Dans un rapport paru en septembre, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) estime que le déploiement mondial de technologies clés telles que les énergies renouvelables, les véhicules électriques et les pompes à chaleur, est si rapide que la demande de charbon, de pétrole et de gaz naturel devrait atteindre son maximum d'ici à 2030. L’Agence réaffirmait alors qu’« aucun nouveau grand projet d'extraction de pétrole et de gaz, aucune nouvelle mine de charbon, ni même un agrandissement de mine ou de centrale à charbon ne sont nécessaires ».