UN NOUVEAU PORT DE PÊCHE A COTONOU : Un défi entre développement, indemnisation et préservation de l’environnement

Le projet de construction d’un nouveau port de pêche à Cotonou suscite de nombreuses réactions. S’il représente une avancée indéniable pour l’économie maritime du Bénin, il pose également des questions cruciales sur l’impact environnemental et la préservation des écosystèmes marins. Entre modernisation, indemnisations des populations affectées et gestion durable des ressources halieutiques, ce projet est à la croisée des chemins entre opportunité et menace écologique.

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Un projet structurant pour dynamiser la pêche béninoise

Le secteur halieutique béninois, essentiel pour l’économie et la sécurité alimentaire, souffre depuis plusieurs années d’infrastructures vétustes, d’une exploitation peu encadrée et d’une diminution progressive des ressources marines. Le nouveau port de pêche ambitionne de remédier à ces défis en offrant aux pêcheurs des infrastructures modernes, incluant des quais adaptés, des installations de conservation des poissons et un meilleur accès aux marchés nationaux et internationaux. L’objectif affiché est clair : améliorer la productivité, réduire les pertes post-capture et renforcer la sécurité des activités maritimes. Par ailleurs, en structurant mieux le secteur, les autorités espèrent lutter contre la pêche illicite qui constitue une menace grandissante pour les stocks halieutiques. 

L’impact environnemental : une menace sous-estimée ?

Si les arguments économiques et sociaux sont largement mis en avant, l’impact environnemental du projet reste un sujet de préoccupation majeur. La construction d’un port de cette envergure risque de bouleverser l’écosystème marin en modifiant les courants, en accélérant l’érosion côtière et en augmentant la pollution des eaux. Les activités portuaires engendrent souvent une forte pollution due aux hydrocarbures, aux déchets plastiques et aux effluents industriels, mettant en danger la biodiversité marine. La zone côtière de Cotonou, déjà fragilisée par l’urbanisation et la montée des eaux, pourrait subir une dégradation accélérée si des mesures de protection ne sont pas mises en place dès le début du projet. Les organisations écologiques alertent également sur l’impact de cette infrastructure sur les mangroves et les récifs coralliens qui jouent un rôle fondamental dans l’équilibre des écosystèmes marins. Ces habitats naturels, qui servent de nurserie pour de nombreuses espèces de poissons, risquent d’être détruits ou considérablement endommagés par les travaux et l’activité portuaire. 

Des compensations financières suffisantes pour les populations affectées ?

La question de l’indemnisation des populations riveraines et des pêcheurs artisanaux demeure au cœur des préoccupations. Déplacer des communautés entières sans garantir leur réinstallation dans des conditions optimales pourrait engendrer des tensions sociales et accentuer la précarité de ces populations qui vivent principalement de la pêche. Le gouvernement béninois a prévu un programme de compensation financière, mais celui-ci sera-t-il suffisant pour permettre aux pêcheurs déplacés de reconstruire leur activité ailleurs ? L’enjeu ne se limite pas à une simple indemnisation pécuniaire. Il s’agit aussi d’accompagner ces communautés vers des solutions alternatives, comme la formation à des pratiques de pêche plus durables, l’accès à de nouveaux équipements et l’intégration dans le futur port modernisé. 

Vers un modèle de développement durable ? 

Face à ces défis, une question essentielle se pose : le Bénin peut-il concilier développement économique et protection environnementale ? La réussite de ce projet dépendra de la capacité des autorités à intégrer des mesures écologiques strictes dès la phase de construction et à adopter une gestion durable des ressources marines. La mise en place de zones marines protégées, le contrôle strict des rejets polluants et la sensibilisation des pêcheurs aux pratiques éco-responsables sont autant de pistes qui pourraient permettre d’atténuer l’impact du port sur l’environnement. Par ailleurs, une collaboration étroite avec les scientifiques et les organisations de protection de l’environnement est nécessaire pour surveiller en permanence l’évolution de l’écosystème marin et ajuster les politiques en conséquence. 

La construction du port de pêche de Cotonou représente une avancée indéniable pour l’économie béninoise, mais elle doit s’accompagner d’une véritable réflexion sur l’impact écologique et social de ce projet. Une modernisation mal pensée pourrait conduire à la destruction irréversible d’un patrimoine naturel précieux et à la marginalisation des communautés locales. Le véritable défi réside donc dans la capacité du Bénin à bâtir une infrastructure qui respecte non seulement les impératifs économiques, mais aussi l’équilibre fragile de son environnement maritime.

 


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